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Photo du rédacteurNenad Popović

Journal de guerre en Ukraine : 32e semaine


Banksy






le 4 octobre 2022, 223e jour de guerre

Jeudi dernier, à Kosinožići a eu lieu le grand dîner d’adieu avec nos Ukrainiens. De Vodnjan sont venus Olesja, Nikola et Marko, et vu que Udo et Gabrijela étaient à la maison, en tout nous étions une quinzaine. Ça a duré de dix-sept heures et demie à vingt heures. À la fin, pas mal de larmes, des bouleversements sous l’effet de la séparation comme si c’était « pour toujours ». C’est impressionnant à quel point les Ukrainiens sont des gens forts, dignes, et nous des pleurnichards. Ainsi Udo et Gabrijela ont rencontré la famille qu’ils avaient aidée financièrement lorsqu’ils étaient au plus mal dès qu’ils sont arrivés. Ils vont à Kyïv. Alina dit que l’explosion du missile qui avait frappé le bâtiment à une heure du soir lorsqu’en août elle était à Kharkiv était effrayante. Son mari a reçu la décoration pour avoir aidé à libérer l’oblast de Kharkiv, elle montrait sa photo avec fierté. À la fin, elle me salua, en français : « Au revoir. » J’espère qu’il en sera ainsi et qu’ils viendront un jour en tant que gens normaux en visite à des gens normaux. Le lendemain, dans l’après-midi, à Moscou se déroulaient les fêtes surréelles à l’occasion de l’annexion d’un cinquième de l’Ukraine, avec, pour de vrai, le concert de chanteurs connus, à ciel ouvert, « jusqu’à tard dans la nuit » etc. Là, il n’y a qu’à attendre à ce que soient déterminées les frontières des territoires annexés. Qu’est-ce qui a précisément été volontairement, avec un plébiscite de quatre-vingt-dix-neuf virgule neuf pour cent rattaché à la Russie, ça il leur faut encore se mettre d’accord à Moscou. Parallèlement, défilent les scènes et rapports de l’exode chaotique de deux cent mille jeunes hommes quittant la Russie, tout comme la nouvelle sur l’avancement (victorieux) de l’armée ukrainienne c’est-à-dire de la défaite russe et du retrait à grande échelle. L’héritage russe : des endroits tout entiers vukovarisés jusqu’à l’os, sans toits, non seulement qu’il n’y a plus ni de l’eau ni de l’électricité, mais c’est qu’il n’y a plus rien, à peine quelques hommes. Le pillage est total : Marko nous a montré le nouveau timbre de la poste ukrainienne sur laquelle est l’image du soldat russe enlaçant sa proie : un micro-onde. Pendant la guerre chez nous, c’étaient des magnétoscopes. Avant hier se sont déroulées les élections en Bosnie et Herzégovine. Le parrain d’Erdogan, Bakir Izetbegović, le vojd musulman, a subi une défaite colossale. Ce qui m’est un soulagement, car le voir et l’écouter était insupportable et honteux pour la Bosnie. Il doit avoir pris de sa mère vu que son père était un homme courtois, avec pas mal de ce charme particulier aux musulmans bosniaques. Des commentaires en détail et des rapports de Bosnie juste après l’annonce des résultats, je ne pouvais ni les voir non plus les entendre. Tout un chacun crache du venin sur l’autre. Un coming out généralisé d’une agressivité maladive. Jusqu’en Croatie, bien entendu, où on ne trouve pas un seul polit-primitif qui ne roule de ses yeux nationalistes à la pensée-même de « Croates de Bosnie ». Là-bas aussi, ils ont un Judas, et ils ne sont pas moins circonspects envers lui. Le pauvre s’appelle Komšić. Il ne manquerait plus qu’il soit élu par des musulmans perfides, par le biais de leur organisation musulmane SDA. Nouvelle rafraîchissante en passant. Dans la ville de Sarajevo, Zoran Milanović devrait être proclamé persona non grata. Au moins, un zeste d’humour bosnien. Les anciennes villes telles que Sarajevo, Dubrovnik ou Split savent vraiment traiter leurs ridicules, ils en ont toujours et les chérissent.



Traduit par Yves-Alexandre Tripković





Journal de guerre en Ukraine


est simultanément publié en croate

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